Il me semble que c’est un jeu de patience, de patience et de dénuement.
Des morceaux d’os blanchis qu’on fait sauter dans ses mains en attendant le lendemain.

12 juil. 2009

Une chute

Il porte son casque de vélo jaune il grimpe dans la structure. Je porte ma fille dans mes bras, elle cogne son casque contre le mien pour rire. Nous attendons, nous allons rentrer. Il tombe une fois, je ne vois pas la chute juste derrière le dos de la personne qui me parle. Je vois mon mari proche de lui qui se penche et le relève, il sourit, rien de cassé. Il remonte. Il essaie d'avancer suspendu aux barreaux d'une échelle horizontale. Ce genre d'exercice de cours de gymnastique. Il veut essayer, il se suspend et agite ses jambes. Il veut être capable «tout seul» et repousse le soutien de son père. Il lâche, tombe sur ses pieds et remonte aussitôt. Il se suspend, lâche encore, tombe sur les fesses cette fois, c'est assez haut. Son père le relève, lui frotte le dos. Mon fils court vers moi, devant les autres il ne veut pas pleurer mais quand même une petite larme a jailli sous le choc, je la vois sous le coin de l'œil. Je pose ma fille, me penche casquée vers mon garçon. Il se tient les reins l'air marqué, j'ai soudain très peur, son père aussi qui s'approche, nous rentrons soucieux. Je lui trouve l'air pâle, les yeux cernés, je crains une paralysie, lui demande s'il voit double, s'il voit flou, s'il se sent mou. Son père le plie, lui fait toucher ses pieds. Bon c'est bien. Nous dessinons longtemps à la craie sur le trottoir. Je m'apaise un peu de le voir absorbé dans le dessin, le visage content d'un bon trait.

9 juil. 2009

Niveau 1

Nous buvons des bières debout au comptoir. Nous parlons, je tripote ma bouteille. Je décolle l'étiquette que je plie en deux. J'abandonne mon pliage je bois une gorgée. Je suis prise dans la conversation, mes mains elles aussi se concentrent sur les mots. Le serveur approche, il ramasse nos bouteilles vides, nous en commandons de nouvelles. Il tend la main vers mon papier, la mienne lui dérobe avant, plus vite. Machinalement sans que je le décide. Je déplie, je replie le papier brillant et moite. J'écoute, je parle, je le déchire un peu, puis le délaisse, les doigts agacés par cette manipulation. Le serveur entre dans mon champs de vision, sur la gauche, il s'approche, il tend la main, je le devance encore. Le manège n'est plus accidentel, les camps se divisent. La responsabilité de l'homme derrière le comptoir est de lutter contre le chaos qui veut s'installer. Il dirige l'action, la recadre. Il ramasse des pièces d'or, il évite les embûches, il circonvient les gorilles et leurs tonneaux. Ses gestes sont rapides, précis, optimisés. Moi, je contrecarre avec un morceau de papier déchiré.

3 juil. 2009

Son film

L'eau est là! L'eau revient au village! Joie!
Pour travailler j'ai mis ma fille devant Kirikou. Je suis installée à mon bureau dans la salon, je cherche à travailler. La bande son s'intercalle, ma fille dit avec un point d'interrogation « maman regarde pas Kirikou?» non elle ne regarde pas, maman. Maman travaille. «D'accord» dit ma fille.
La réalité de Kirikou est plus forte que la mienne. Le potager est dévasté et avant qu'il ne produise nous allons mourir de faim. J'ai des problèmes moins graves, c'est sûr. Mes problèmes n'ont pas de nom et pas de solutions. Nous allons devenir potiers! C'est la femme forte qui crie. Je ne vois pas ce que je pourrais crier de mon avenir avec autant de conviction. Kirikou est petit mais il est vaillant. Je suis grande et je me sens incapable. Et Kirikou que fait-il ? Il fait fortune ! Il vend même des pots qui ne sont pas encore faits. La sorcière enrage. Moi aussi.

1 juil. 2009

Son voyage

La pluie tombe forte et molle, des grosses gouttes qui noient le pare-brise. Je reviens de l'aéroport, il y a beaucoup de ciel, toujours dans ces moments là. Je mets de la musique, je prend ma place dans le mouvement. Tout a l'air nécessaire et important, c'est comme ça que c'est beau. Ma mère est repartie.