Il me semble que c’est un jeu de patience, de patience et de dénuement.
Des morceaux d’os blanchis qu’on fait sauter dans ses mains en attendant le lendemain.

12 avr. 2011

Le ralenti

Sous la pluie la femme policier replie la couverture de survie qui attrape la lumière des gyrophares. La jeune femme porte un unique gilet pare-balles sur sa chemise bleue claire boutonnée haut. Ses gestes sont précis indifférents à ce qui tombe du ciel. Une ambulance et plusieurs voitures de police sont stationnées entre deux cordons de sécurité orange que protègent encore deux voitures de police pour bloquer ce segment d'avenue. Il pleut il fait nuit je roule au ralenti dans le sens inverse. Des hommes des femmes s'affairent : l'un accroupi referme les rabats d'un sac de matériel, il se lève et marche vers l'ambulance. Deux autres replient une civière, plusieurs forment un groupe serré, conciliabule. Je tourne après le barrage sur ma gauche pour rejoindre mon bureau. Une voiture dans l'autre sens veut forcer le cordon et attend qu'on lève l'obstacle devant son impérieuse volonté dont témoigne son clignotant. Le policier assis dans la voiture qui fait barrage ouvre sa portière et sans descendre adresse au chauffeur un geste écoeuré dont je pourrais sous-titrer toute l'incompréhension lasse. En gros et pour le dire poli «Qu'est-ce tu crois que tu fais, là?»
Je longe la track de chemin de fer, bientôt arrivent des phares dans mon rétroviseur, c'est l'ambulance que je viens de croiser. Elle roule patiemment derrière moi qui ne vais pas vite. Aucune des lumières qui signalent habituellement son urgence n'est allumée. Sans doute que ça n'est plus la peine.